vendredi 13 décembre 2024

Nouvelles du 4ème trimestre 2024

 Bonjour,

Nous voici déjà à la fin de cette année 2024. Au risque de me répéter, nous ne l’avons pas vue passer. Il semble parfois que le temps n’ait plus la même durée, et pourtant ...

Ce fut pour nous à Crianças do Mundo une année bien productive  avec les enfants. Les moments plus durs et les problèmes et soucis n’ont bien sûr pas manqués, mais le bilan est positif. Les enfants difficiles ont dans l’ensemble bien évolué, les petits nouveaux ont été bien accueillis et se sont bien intégrés dans le groupe ; et notre équipe a continué son formidable travail avec toujours autant d’amour, de compétence et de dévouement.

Après six mois d’une sécheresse épouvantable, de mars à octobre, amenant de nombreux incendies dans tout le Brésil, nous avons enfin retrouvé de la pluie à la mi-octobre. En septembre, un article dans une des plus importantes revues brésiliennes s’intitulait :  « Le Brésil est en feu » ! Depuis des mois, le pays brûlait ; l’Amazonie, le Pantanal, des dizaines de réserves naturelles ... 60% du territoire national était en feu ! C’était absolument affolant, triste à pleurer et profondément désolant. L’arrivée de la pluie fut une véritable bénédiction, même si la destruction fut terrible et irrécupérable

Que tout ceci ne nous empêche pas, nos enfants, notre équipe et moi-même, de vous souhaiter du fond du coeur une...













 

MERVEILLEUSE FÊTE DE NOËL !

TRÈS HEUREUSE ANNÉE 2025 !

SOYEZ  HEUREUX et MILLE MERCIS POUR VOTRE SOUTIEN FIDÈLE !


Allons nous excercer le cerveau !

Comme je vous l’ai déjà expliqué dans une précédente revue, nous avons obtenu il y a trois ans maintenant, après introduction d’un dossier complet sur Crianças do Mundo,  l’autorisation de participer au FIA, Fundo da Infância e Adolescência, le Fonds de l’Enfance et de l’Adolescence. Pour ceux qui ne s’en souviennent plus, c’est un Fonds créé au Brésil et qui fonctionne à partir de donations d’entreprises, de sociétés, de particuliers... et qui leur permet d’obtenir une déduction fiscale, comme cela existe depuis longtemps en Belgique. Ce Fonds nous permet d’introduire un projet par an, et s’il est accepté, nous recevons les subsides nécessaires à la réalisation de ce projet. Lorsqu’il s’agit d’un projet demandant une somme importante, il doit être unique. Si le montant demandé est plus petit, nous pouvons faire deux demandes dans le même dossier.



En juillet 2022, nous avons obtenu les subsides, importants, nécessaires à l’installation de 54 panneaux solaires. Grâce à cela, nous avons considérablement réduit nos dépenses énergétiques. Seule ombre au tableau, le calcul que l’équipe engagée avait fait n’était pas correct. Ils ont sous-estimé les besoins. Les 54 panneaux ont été suffisants pour tout le Centre d’Activités où restent les 75 garçons. Mais les bâtiments qui se situent dans la partie basse du terrain, entre autres la maison où vivent les 31 filles, n’ont pas été couverts par les panneaux solaires. Comme nous continuions à recevoir les factures d’électricité comme avant, nous avons demandé à un technicien spécialisé de venir faire une étude pour voir ce qui se passait. Il a constaté que les besoins étaient plus grands que ceux établis au départ. Nous avons donc dû, cette fois à nos frais malheureusement, le projet ayant été clôturé, couvrir les toits de 20  panneaux solaires supplémentaires. Cela nous a coûté 4.500 euros, mais maintenant, depuis le mois de septembre, nous ne payons plus d’électricité pour l’entièreté de nos bâtiments.

En juillet 2023, nous avons introduit deux projets moins coûteux : l’achat de 8 nouveaux ordinateurs pour notre salle d’informatique ; et l’installation du projet « exerçant notre cerveau ». Ce projet a été créé par un de nos anciens, Alisson et de son épouse Adriana. Ils ont ouvert une école au centre-ville où ils donnent des cours spécifiques à ce projet. Il s’agit d’activités diverses,  comme des jeux de toutes sortes, des rébus, des questionnaires ... ,  permettant d’exercer le cerveau de façon ludique mais instructif. Ils ont formé différents groupes, adaptant les activités en fonction de l’ âge. Ils ont des groupes d’enfants depuis la maternelle jusqu’aux primaires ; des adolescents ; des adultes et des personnes âgées. Toutes les activités proposées sont très attrayantes et utiles pour développer le cerveau en formation, ou pour maintenir le cerveau alerte et améliorer la mémoire pour les personnes plus âgées. Et ces cours plaisent à beaucoup de gens ; Alisson et Adriana ont dû ouvrir de plus en plus de classes et sont même en recherche de plus de professeurs actuellement. Ils forment eux-mêmes les professeurs à donner ce genre de cours.

Alisson nous a demandé un jour si ça nous intéresserait d’emmener certains de nos enfants chez eux, à leur école, afin qu’ils puissent participer à ces cours de développement du cerveau. Ça nous intéressait beaucoup bien sûr, mais il y avait deux problèmes : la logistique et quels enfants choisir. Nous en avons parlé avec lui et avec Adriana, et nous leur avons demandé si ce serait éventuellement possible d’implanter ces cours chez nous à Crianças do Mundo pour tous les enfants. Ce serait plus simple à organiser et ce serait aussi plus juste pour les enfants ; tous auraient la chance de pouvoir y participer. Après réflexion pour voir leur disponibilité, ils ont accepté et c’est Adriana elle-même qui s’est engagée à venir donner les cours à nos enfants. 

Il fallait alors mettre sur papier les deux projets bien complets, afin de les présenter au FIA. Et heureusement, ils ont été acceptés tous les deux ! Il a fallu être patient, surtout en ce qui concernait les ordinateurs. Mais en fin d’année, nous avons donc reçu les huit nouveaux ordinateurs pour notre salle d’informatique. Pendant cette attente, nous avons pu, grâce à l’aide de la Fondation Vie d’Enfant et de la Paroisse St Joseph de Wezembeek-Oppem, rénover la maison où se trouve notre salle d’informatique. Tout le bâtiment avait été très endommagé par les intempéries. Les portes, les murs intérieurs et extérieurs, tout était à refaire. Peintures, vernissage des portes, et installation d’un toit protecteur contre les pluies et l’humidité, tous les travaux nécessaires ont été réalisés ; le toit par une société spécialisée, et les peintures et vernissages par nos propres ouvriers. Par contre,  le payement du salaire du professeur pour le projet « Exerçant le cerveau » et le matériel nécessaire pour la réalisation de ce projet sont arrivés plus rapidement. Nous avons donc seulement attendu que le bâtiment soit prêt pour commencer nos projets. Et en ce début d’année 2024, tout a commencé, au grand plaisir des enfants.








Le club de football de Crianças du Mundo

 Dans une précédente revue, je vous ai parlé de notre volonté, suite au désir exprimé par les enfants depuis  longtemps, de recréer notre petite école de football, comme elle a existé il y a une vingtaine d’années. Pour cela, il nous fallait évidemment trouver les fonds nécessaires à l’achat de tout l’équipement. J’avais fait un appel auprès d’une paroisse en Belgique, qui recherchait un objectif pour leur collecte de carême, mais cela n‘a pas fonctionné. Nous avons donc essayé auprès de nombreuses entreprises ici au Brésil, mais ce fut très difficile d’obtenir une réponse positive. Jusqu’à ce mois d’août 2024, où la grande société minière « A Vale »  nous a répondu favorablement. Il a fallu présenter un projet complet et bien élaboré et détaillé, avec toutes les tailles, tant des vêtements que des chaussures à clous. Ce que nous avons fait le plus rapidement possible.

Et le mercredi 11 septembre, toute une équipe de la Vale est arrivée avec une camionnette remplie de caisses ! Ils ont offert à nos enfants non seulement tout l’équipement de foot, mais également d’autres matériels sportifs, comme des maillots de gymnastique, des bonnets et lunettes de natation, des  houla-hoop , des ballons de football, de basket et de volley ... bref un cadeau absolument EXTRAORDINAIRE !

Vous auriez dû voir le bonheur des enfants en découvrant tous ces cadeaux ! Ils sautaient et hurlaient de joie ! Quel dommage de ne pas pouvoir mettre dans notre petite revue la vidéo tournée au moment de leurs explosions de joie ! Ça fait tellement plaisir de voir le bonheur des enfants !


Nous envisageons donc de recréer, grâce à cette aide de la Vale, notre petit club de football de Crianças do Mundo, et ceci dès la rentrée 2025. D’ici là, les entraînements auront déjà lieu pour constituer l’équipe. Les enfants sont super animés et très enthousiastes. La sélection ne sera pas facile ! Je vous tiendrai bien sûr au courant de l’évolution de tout ceci. En attendant, les enfants peuvent déjà utiliser les autres équipements sportifs mis à leur disposition pendant les heures d’activités physiques. Voilà un rêve des enfants qui se réalise et c’est formidable !






C'est la fête !

Le 12 octobre est férié national au Brésil pour  la fête de « Nossa Senhora de Aparecida do Norte », Notre-Dame de l’Apparition du Nord. Elle est la Vierge Noire patronne du Brésil. 

Mais le 12 octobre est aussi le « Jour de l’Enfant » au Brésil, un peu la St Nicolas belge. Comme les écoles fermaient pendant une semaine, nous avons accueilli nos enfants toute cette semaine-là en horaire spécial, c’est-à-dire tous ensemble de 10h à 17h. Et nous avons organisé pour eux un tas de jeux et d’activités ludiques. 

LA JOIE À LA PISCINE AVEC LES NOUVEAUX BONNETS ET LUNETTES !








Ce fut une semaine super animée et joyeuse, qui s’est déroulée dans une ambiance du tonnerre, sans aucun heurt ni problème. Tout le monde fut très heureux, enfants et adultes et tous en garderont un très chouette souvenir.

mercredi 25 septembre 2024

Le minibus de Crianças do Mundo

Evelyne nous entretenait de l’achat d’un nouveau (pas neuf) mini-bus.

L’appel lancé n’a pas eu de répondants suffisants que pour se lancer dans cette nouvelle acquisition.

Il est évident que le montant est à la hauteur du véhicule souhaité.

Ce mini-bus n’est bien sûr pas du luxe pour divertir les enfants. C’est un OUTIL DE TRAVAIL pour l’association. Il est utilisé quotidiennement pour diverses activités, dont le transport des enfants bien sûr, mais aussi pour les courses alimentaires régulières. Pour cette fameuse troupe, un sac à main est évidemment peu pratique.

Les dons récoltés jusqu’à présent ont suffi seulement à effectuer les réparations urgentes pour que l’engin puisse rouler plus ou moins correctement.

Mais cela ne pourra pas durer et il s’agit donc d’une « emplâtre sur une jambe de bois » et dans un futur (pas très lointain), le mini-bus actuel pourrait bien rendre l’âme définitivement.

Il s’agit donc d’un don spécial « mini-bus », ca Evelyne ne peut pas puiser dans les dons habituels qui servent, vous le savez, à la (sur)vie quotidienne. Il faut boire, manger, étudier, se doucher, et se soigner TOUS LES JOURS.

C’est donc un nouvel appel que nous lançons pour trouver la solution à ce problème épineux et plus important qu’il n’y paraît.

Ce nouveau mini-bus (d’occasion) vaudrait environ 30.000 Euros.

Merci pour ce que vous ferez en faisant aussi appel à des connaissances, firmes, entreprises, services-clubs, paroisses, etc... Et n’oublions pas que les petits ruisseaux font les grandes rivières.

Ce mini-bus pourrait se nommer « Solidarité Belgique » grâce à VOUS !

Mille MERCIS !






Paul et Brigitte WILKIN – van WESSEM
pbwil@yahoo.fr
0474/863005                                    Evelyne : criancasdomundo@yahoo.com.br      

Nouvelles du 3ème trimestre 2024

Bonjour,

En Belgique, les vacances d’été sont terminées et j’espère que vous en avez tous bien profité. Ici au Brésil, il y a eu pour les enfants deux semaines de vacances d’hiver, du 20 juillet au 5 août. Mais chez nous à Crianças do Mundo, ils n’ont eu que 10 jours, car ils n’aiment pas trop les vacances. Nous les avons à nouveau accueillis à partir du 1er août. Pendant l’absence des enfants, avec notre équipe pédagogique, nous avons bénéficié de quelques jours très enrichissants grâce à des conférences vraiment intéressantes. Je vous en parle un peu plus loin.

J’ai aussi décidé de vous raconter un de nos « échecs ». Ce n’est pas facile d’en parler, on préfère toujours parler de ce qui va bien. Mais Michel et moi avons toujours trouvé important de tout partager avec vous, les bonnes comme les mauvaises choses. Et heureusement, les bonnes sont bien plus nombreuses. Vous allez donc découvrir l’histoire de Thauann, un enfant que j’adore, mais que je n’ai malheureusement pas pu garder avec nous.

En ce qui concerne le minibus dont je vous avais parlé, nous n’avons pas été en mesure d’en acheter un autre, du moins pour le moment. Mais grâce à l’aide des quelques personnes qui ont versé dans ce but, nous avons pu remettre en état notre minibus actuel. Celui-ci est maintenant prêt à nous servir pendant une nouvelle période ! Un grand merci à ces donateurs !

Et un immense MERCI à vous tous, amis fidèles, qui continuez à nous lire, à nous aider et à nous accorder votre confiance. C’est essentiel pour nous et pour nos enfants !

                                                                                                         Evelyne




Thauann, notre enfant perdu

Nous aimerions vraiment croire aux miracles, mais ceux-ci ne se réalisent malheureusement pas toujours.



Nous sommes début février 2022. Les inscriptions des petits nouveaux ont lieu et beaucoup se présentent, souhaitant être accueillis à Crianças do Mundo. Comme toujours, les demandes sont plus nombreuses que les places disponibles. Donc à un moment donné, je n’ai pas le choix et je décide d’arrêter les inscriptions. La nouvelle année scolaire commence et nous accueillons tous les petits nouveaux inscrits. Certains ne sont pas faciles du tout, et plusieurs ont des problèmes de TDAH, de TOC, d’autisme ou autres. Le travail ne sera pas facile cette année, mais notre équipe est prête et nous allons affronter les défis.

Vers la fin du mois de février, je reçois un coup de fil d’une assistante sociale de la préfecture, me parlant du cas d’un enfant qui a vraiment besoin d’être accueilli chez nous. Je lui réponds tout d’abord que nous n’avons plus de places, que nous avons déjà dû refuser beaucoup d’enfants les dernières semaines. En plus, nous n’avons jamais été enthousiastes Michel et moi à prendre des enfants indiqués par la préfecture. Nous préférons recevoir les enfants qui se présentent avec leur maman ou quelqu’un de leur famille.

L’assistante sociale insiste, me dit que c’est un enfant qui n’a pas de parents. C’est sa grand-mère qui l’élève seule , mais  celle-ci a des problèmes de santé, alors c’est très difficile pour elle de bien s’occuper de lui. Il est en situation de risque, car il passe beaucoup de temps en rue. Je sens la pression et je n’ai pas trop le choix : je lui dis qu’elle prévienne la grand-mère, afin que celle-ci amène l’enfant pour que je le voie et que je parle un peu avec lui.

Un jour de début mars, la grand-mère, Noêmia, se présente à notre grille avec l’enfant. Nous les laissons entrer et je reçois l’enfant au bureau. Il s’appelle Thauann et il a 9 ans. Il est très maigre et pâle. Je parle un peu avec lui avant de lui poser quelques questions, il me répond sans problèmes. Il n’a pas l’air timide et m’interroge sur les choses qu’il voit dans le bureau, les photos d’autres enfants entre autres. Je lui explique que ce sont des enfants qui sont passés par Crianças do Mundo, mais qui maintenant sont déjà adultes. Lorsque je lui demande s’il souhaiterait être accueilli chez nous, il me répond que oui, beaucoup ! Il a entendu parler de Crianças do Mundo par d’autres enfants à l’école et il sait que c’est chouette chez nous ! Son enthousiasme et son envie d’entrer me désarment et je décide de l’accueillir malgré tout. Rien pendant cette entrevue ne me laisse entrevoir de problèmes particuliers. Thauann est vif, intelligent et ses conversations intéressantes.

Le lundi 7 mars 2022, Thauann entre chez nous pour son premier jour à Crianças do Mundo. Il se passe alors quelque chose de tout à fait inhabituel chez nous : certains de nos autres enfants font la grimace lorsqu’ils découvrent la présence de Thauann. Nos enfants sont toujours accueillants avec les nouveaux ; c’est quelque chose dont nous leur parlons très souvent, car l’accueil les premiers jours est très important. Tous sont passés par là, et ils savent que ce n’est pas toujours facile de s’adapter au début, au milieu d’autant d’enfants. Donc généralement, ça se passe très bien. Il y a même à chaque fois un « parrain » pour chaque nouveau petit qui entre. C’est un autre de nos enfants qui décide de s’occuper du petit nouveau, de lui montrer les endroits, de lui expliquer les choses, et c’est super.

La réaction de certains face à l’arrivée de Thauann m’étonne donc. Dès que j’en ai l’occasion, j’appelle ces enfants et leur explique que ce n’est pas gentil de réagir de cette façon devant Thauann, qu’on leur demande toujours d’être accueillants envers les petits nouveaux. Les enfants se regardent entre eux et je vois qu’ils veulent me dire quelque chose. Je les laisse donc me parler et ils m’expliquent que Thauann est un garçon insupportable à l’école, qu’il n’obéit à personne, qu’il ne fait que le bazar en classe et ne veut rien faire, qu’il est grossier avec tout le monde, même les adultes... bref, qu’il est vraiment difficile et que personne ne l’aime à cause de ça. Je leur explique que nous pourrons peut-être aider Thauann à changer chez nous, entouré de tous. Que ça vaut en tout cas la peine d’essayer et que je leur demande leur aide.

Les jours passent. Thauan se révèle être en effet un enfant terriblement perturbé. Il est hyper actif, n’obéit pas aux adultes, est la mouche du coche avec les autres enfants, dérange tout le monde pendant l’étude et les activités sportives ... bref un vrai problème dans le groupe. 

Je vais rendre visite à sa grand-mère pour essayer d’en apprendre un peu plus sur Thauann. Je lui explique les raisons de ma visite, désirant en savoir un peu plus sur l’enfant pour que nous puissions l’aider à évoluer. Elle me parle d’abord beaucoup d’elle, qu’elle n’a pas une bonne santé, qu’elle est dépressive,  qu’elle prend beaucoup de médicaments, qu’elle a vraiment des difficultés pour s’occuper de Thauann. Je la sens elle-même bien perturbée. Lorsqu’elle me parle enfin de Thauann, elle finit par avouer qu’il a de sérieux problèmes et qu’il est en traitement psychiatrique. Il a trois troubles du comportement et prend trois médicaments différents. Elle me fournit le rapport du psychiâtre, car j’en ai besoin pour son dossier médical. Je lui promets une autre visite bientôt et notre aide autant que possible avec Thauann.

En rentrant à Crianças do Mundo, dès que j’en ai l’occasion, je réunis notre équipe pédagogique pour leur faire part de ce que j’ai appris sur Thauann, afin que nous essayions de faire un travail en commun avec lui. J’avoue ne pas être satisfaite sur l’assistante sociale de la préfecture qui m’a trompée en omettant ces informations si importantes sur le gamin. Mais voilà, maintenant il est parmi nous et nous allons faire un maximum pour aider Thauann à évoluer.

Les semaines s’écoulent ; tous s’impliquent à fond pour travailler plus individuellement avec Thauann. Je demande même souvent aux autres enfants d’avoir de la patience avec lui, car il a des problèmes dont il n’est pas responsable. Mais les journées sont difficiles. Thauann est presqu’ingérable. Pendant l’étude, il ne reste pas en place. Il circule partout, sort de la classe, se rend dans les autres classes où il perturbe tous les autres, n’obéit pas lorsque sa professeur lui parle. répond parfois grossièrement. Il est pourtant intelligent ; quand il est bien disposé et décidé, il parvient à faire ses devoirs sans aucune difficulté, il comprend très vite et apprend sans problèmes. Mais il n’en a pas envie la plupart du temps. Pendant les activités sportives ou autres, le problème se pose également ; il perturbe et ennuie tous les autres enfants et n’obéit pas du tout au professeur.

Très souvent je suis appelée pour essayer de parler à Thauann, de le calmer, de le raisonner, car heureusement, il m’écoute et me respecte. Je lui dis à chaque fois qu’il est intelligent et que c’est vraiment dommage de gaspiller ainsi son intelligence par son comportement si difficile. Il me promet à chaque fois qu’il va faire un effort. Mais manifestement, il n’y parvient pas.

A l’école, il est encore pire et je suis appelée souvent par la directrice qui veut me faire partager tout ce que Thauann y fait. Nous nous sentons tous bien impuissants face à ce genre de situation. Mais nous voulons tout de même continuer à y croire et à aider Thauann du mieux que nous le pouvons.

L’année 2022 se termine. Après les vacances, en janvier 2023, tous les enfants reviennent, inclus Thauann. Nous voulons encore essayer pendant un temps, dans l’espoir de voir au moins une petite évolution chez lui.

Mais les semaines, les mois s’écoulent, et rien, pas la moindre amélioration de comportement chez Thauann. En plus, un autre sérieux problème apparaît chez Thauann : il vole. A plusieurs reprises déjà, les enfants s’étaient plaints que des objets disparaissaient, comme des règles, des gommes, des crayons de couleurs... Mais nous n’avions aucune preuve de qui était le coupable. Mais un jour, je suis à nouveau appelée à l’école et la directrice me dit que Thauann a déjà volé à plusieurs reprises à l’école et que cette fois, c’est plus grave, car il a pris l’argent de la caisse de l’école qui se trouvait dans son bureau. Une secrétaire l’a vu entrer et l’a ensuite vu sauter le mur de l’école et partir. Il n’y a donc plus aucun doute. L’école prévient sa grand-mère et de mon côté, je vais la voir pour lui parler de ce problème de vol avec Thauann chez nous également.

Ce jour-là, je comprends que nous ne pourrons plus faire grand chose pour aider Thauann à évoluer, car nous n’aurons jamais l’aide et la collaboration de sa grand-mère. Quand je lui parle des vols qu’il commet, sa grand-mère le couvre. Elle me raconte toute une histoire à dormir debout, que Thauann a trouvé un portefeuille en rue, qu’il est allé le rendre à son propriétaire et que celui-ci, pour remercier Thauann pour son honnêteté, lui a donné de l’argent. Et comme par hasard, la somme que Thauann a reçu de cet homme correspond exactement à la somme qu’il a volée à l’école. A partir du moment où sa grand-mère le couvre et ment pour le défendre, nous n’avons plus guère de moyens d’actions avec l’enfant. La collaboration des familles est très importante dans notre travail et c’est elle qui permet l’évolution positive des enfants.

Je rentre déçue à Crianças do Mundo et partage les informations avec notre équipe pédagogique. Nous sommes en septembre. Il reste trois mois avant la fin de l’année. A plusieurs reprises, je suis obligée de donner une suspension d’un ou plusieurs jours à 

Thauann à cause de sérieux problèmes de comportement : grossièreté envers les professeurs, insultes et bagarres avec d’autres enfants, Thauann reste ingérable malgré 

toutes nos tentatives avec lui, par la punition ou par l’affection. Rien ne fonctionne et c’est terriblement frustrant. Mais je demande à notre équipe de tenir bon et de continuer jusqu’à la fin de l’année. Je n’ai pas le courage de mettre Thauann tout simplement dehors. Je veux essayer de le garder jusqu’à la fin de l’année, afin qu’il ne se sente pas rejeté. Car il a son côté positif, il est très affectueux, et je me suis attachée à lui malgré les difficultés qu’il crée chez nous. Je sais que sans Crianças do Mundo, il sera perdu. 

Mais les derniers mois avec lui sont vraiment très difficiles et je sens l’épuisement de tous dans notre équipe. Les autres enfants ne supportent plus Thauann et ne font plus que se plaindre de lui. La situation est arrivée à la limite et je sais que je n’aurai pas le choix : il faudra que je prenne la décision de ne plus accepter Thauann l’année prochaine.

Les enfants partent en vacances fin décembre 2023 et dans le courant du mois de janvier, je me rends chez Thauann le coeur lourd, afin de lui annoncer, ainsi qu’à sa grand-mère, qu’il ne pourra plus venir à Crianças do Mundo cette année 2024. J’explique une fois de plus à sa grand-mère tout ce que Thauann a fait chez nous, que ce n’est plus possible de continuer avec lui, parce qu’il ne veut faire aucun effort pour améliorer son comportement. Il perturbe tout le groupe, et je ne peux plus l’accepter. Je sens que la grand-mère n’est pas contente. Thauann ne manifeste rien, mais je sais qu’au fond de lui, il doit être triste, car il aimait bien venir chez nous. Je lui dis que je ne l’abandonnerai pas, que je continuerai à l’aider d’une autre façon et qu’il pourra venir passer de temps en temps une journée chez nous s’il promet de bien se comporter. 

Malgré tout, je repars de chez Thauann avec un goût amer, triste et déçue de ne pas avoir  pu  aider Thauann à évoluer au moins un peu pendant ces deux années qu’il a passées chez nous. Nous devons apprendre à accepter nos limites et accepter que nous ne pouvons pas sauver tous les enfants. Mais c’est douloureux et terriblement frustrant.

Depuis sa sortie, je continue d’accompagner Thauann comme promis. Il vient de temps en temps passer une journée chez nous et je vais régulièrement le voir chez sa grand-mère et je les aide au niveau matériel, car ils en ont bien besoin. Je lui ai porté tout le matériel scolaire nécessaire au début de l’année, ainsi que les uniformes d’école, car il a changé d’établissement. Je leur porte régulièrement un colis alimentaire et parfois les médicaments dont il a besoin si la grand-mère ne parvient pas à les obtenir au poste de santé de la préfecture. Thauann se rend ainsi compte que je tiens ma promesse de ne pas l’abandonner. Son affection reste réelle et profonde, il ne m’en veut pas. Et à chaque visite, il me serre très fort dans ses bras. Ça me touche beaucoup et me rend encore plus triste d’avoir dû le laisser partir. Mais je continuerai à accompagner Thauann aussi longtemps que je le pourrai, pour essayer de le sauver d’une vie de délinquance et de misère. La vie n’a pas été juste avec lui et il mérite qu’on ne le laisse pas tomber.                                                

                                                                                                Evelyne